Entre engagements affichés pour la cause des femmes et dérapages, Brigitte Macron se retrouve au cœur d’une nouvelle polémique. Sa sortie injurieuse envers des militantes féministes ravive les contradictions de l’image que donne la Première dame entre transgression et conservatisme.
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Publié le 13/12/2025 10:00
Temps de lecture : 5min

Brigitte Macron, la Première dame, à l’Élysée, à Paris, le 21 mai 2025. (CHRISTOPHE PETIT TESSON / AFP)
Brigitte Macon n’en finit pas de faire parler d’elle. La polémique ne retombe pas après sa sortie dans les coulisses des Folies Bergères à Paris. Dans une vidéo rendue publique, lundi 8 décembre, elle traite de “sales connes” des féministes qui ont interrompu le spectacle d’Ary Abittan, l’humoriste accusé de viol et qui a bénéficié d’un non-lieu.
Le 8 mars 2017, Journée Internationale des droits des femmes, en pleine campagne présidentielle, le candidat Emmanuel Macron en profite pour donner un meeting au théâtre Antoine à Paris. À la fin de son discours, il fait monter sur scène sa femme Brigitte Macron qui prend le micro. “Merci les femmes, lance-t-elle, face une foule qui l’applaudit. Tous les jours dans la rue, parce que moi je me balade, je marche beaucoup, vous êtes là en me disant ‘allez-y, on vous aime’, et c’est énorme pour moi. Si je tiens c’est parce que vous êtes là !”
Brigitte Macron fait ici sans doute référence à l’avalanche de réactions sexistes dont elle est victime. On connaît l’histoire : elle a 24 ans de plus que son mari, ils se sont rencontrés au lycée à Amiens, elle était professeure et mère de famille, il était élève, un tabou. Le monde entier fait les yeux ronds. Ce qui ne l’empêche pas, lors de cette première campagne présidentielle, de faire plusieurs fois avec Emmanuel Macron la couverture de Paris Match, y compris en maillot de bain.
Certaines n’hésitent pas à la défendre. Comme après l’élection de son mari, quand Charlie Hebdo la représente enceinte avec cette légende “Il va faire des miracles”, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer la misogynie du dessin, dont Ovidie, ex-star du X et féministe engagée. Dans la foulée, en octobre 2017, c’est l’affaire Weinstein et la déferlante #MeToo. Brigitte Macron applaudit lors des cérémonies officielles. Elle refuse d’apparaître derrière son mari. Dans son bureau à l’Élysée, elle garde un vase sur lequel on peut lire : “Je ne suis pas une potiche”.
En 2024, quand on lui demande son avis sur le procès dit des viols de Mazan, elle assure son “soutien inconditionnel à toutes les femmes”. “Je suis auprès d’elles, elles le savent, assure-t-elle. Je suis avec toutes les femmes, dans tous les combats. Je veux leur dire à quel point le président, moi, on est totalement solidaire avec elles. (…) Ce procès était essentiel. Il fallait que les choses soient dites et elles le sont.”
Plusieurs prises de parole et une histoire personnelle qui peuvent donner de Brigitte Macron l’image d’une femme qui transgresse les tabous, qui prône l’émancipation. L’image d’une bourgeoise – issue d’une grande famille d’Amiens, chocolatier de père en fils, résidence secondaire au Touquet – qui s’est affranchie.
Pourtant, plusieurs épisodes montrent aussi à quel point la Première dame reste ancrée dans le conformisme qui l’a vu grandir. Par exemple, le pronom non genré “iel” que l’ancienne professeure de français, qui a fait toute sa carrière dans des établissements privés religieux, critique. Elle soutient, en revanche, le port de l’uniforme à l’école. Puis, il y a ce métier de prof qu’elle quitte en 2015 au profit de d’Emmanuel Macron qui vise la présidence de la République. La journaliste Anne Fulda revient là-dessus dans le documentaire Brigitte Macron un roman français : “Elle, la transgressive, se glisse dans des habits assez traditionnels de femme qui abandonne un métier qu’elle adore pour se mettre au service de son mari. Elle traduit très certainement les réactions d’une certaine France de province, conservatrice, plutôt de droite, parce que c’est le milieu dont elle vient.”
Brigitte Macron à la fois libérée donc et enfermée dans de vieux réflexes traditionalistes. Face à la rumeur qui court depuis des années sur les réseaux sociaux, selon laquelle elle serait une femme transgenre, elle décide de passer à l’action. L’été 2025, elle saisit la justice aux États-Unis, en France, elle avait déjà fait de même l’année précédente.
Dès 2022, d’ailleurs, elle se défend dans les médias : “Il y a trois niveaux, déclare-t-elle alors lors d’une interview. Le premier niveau ce sont les émetteurs. En l’occurrence, là, ce sont des femmes. Ensuite, il y a ceux qui relaient et qui amplifient. Et ensuite, il y a bien évidemment les hébergeurs. Et, moi, si je n’y vais pas, si je ne fais rien, alors que ça fait quatre ans que je suis contre le harcèlement, je ne suis pas audible. On va me dire ‘mais vous, vous ne faites rien'”. Sauf certains défenseurs de la cause LGBTQ+ qui expliquent à Brigitte Macron qu’elle ne devrait pas se sentir offensée. Selon eux, elle ne devrait pas porter plainte car ils le rappellent : l’identité transgenre n’est pas une insulte.
Si on ajoute à cela sa fameuse sortie sur “les sales connes” – désormais célèbre – elle risque de définitivement être reléguée dans le camp des dames d’une autre génération, incapable de regarder le monde d’aujourd’hui et prompte à le mépriser.


